Il y a plusieurs années de cela, une amie nous a accompagnés, mon conjoint et moi, pour aller souper. Alors que nous nous dirigions vers la voiture après avoir mangé, elle m’a demandé : « Dis-moi, il boit toujours autant ? » Armée d’un faux sourire et d’un ton désinvolte, j’ai rétorqué : « Oh non ! Il boit simplement à l’occasion. » J’étais triste, en colère et gênée ; mais j’étais dans le déni total en ce qui avait trait à son alcoolisme. Elle m’a encouragée d’essayer Al‑Anon ; remarque à laquelle j’ai répondu : « Pourquoi est-ce que je devrais aller à Al‑Anon ? C’est lui qui a le problème ! » C’était tout ce que j’étais prête à admettre. Elle m’a brièvement expliqué ce qu’était Al‑Anon, mais elle n’a pas mentionné pourquoi c’était un programme qui me conviendrait. C’était l’éléphant dans le salon.

Quelques années plus tard, un jeudi soir, toute ma rage et ma frustration causées par ce sentiment d’impuissance face à sa consommation d’alcool sont remontées à la surface et ont fini par exploser comme un volcan. J’étais devenue folle, hurlant à tue-tête et le traitant de tous les noms. Je lui ai dit que je souhaitais sa mort et que je souhaitais ma propre mort parce que je ne supportais plus de me sentir mal dans ma peau. Je me souviens de cet incident comme d’une expérience surréelle. Je me suis dit : « Qui était cette femme ? » Le jour suivant, j’ai rassemblé du courage pour aller assister à ma première réunion Al‑Anon. Quel cadeau ! Quel miracle ! Je n’avais jamais réalisé que j’étais impuissante face à l’alcool. Cette première réunion a eu un impact profond et durable sur moi. De son côté, mon mari était mortifié de savoir que j’étais allée à une réunion, parce que maintenant, il craignait que tout le monde découvre qu’il était alcoolique. Nous étions tous deux convaincus qu’il avait caché sa consommation d’alcool des yeux d’autrui. Aujourd’hui, je sais que l’alcoolisme est vraiment un mal familial.

Par Jeanine G., Louisiane
The Forum, juin 2018